Art Orienté Objet

Ecole

Art Orienté Objet est un duo artistique créé en 1991 à Paris, réunissant Marion Laval-Jeantet et Benoît Mangin. Dans une approche résolument interdisciplinaire leur propos est d’étendre sans cesse la capacité de l’art à communiquer d’une manière non verbale. Au travers d’expériences anthropologiques, écologiques ou biotechnologiques, ils cherchent à comprendre les limites de leur propre conscience. Que ce soit par la tradition du Bwiti des pygmées, des expériences de méditation, ou une injection de sang de cheval, leur dessein est de dépasser leur propre entendement du monde, et de pouvoir transmettre ainsi la vision « grand angle » née de cette expérience.

Leurs travaux dans le domaine de la biotechnologie les ont rattachés au mouvement Art Bio-tech (Jens Hauser, le Lieu Unique, 2003), et ils sont souvent rangés parmi les artistes aux frontières de l'art et de la science. Prônant un art de la résistance aux systèmes qui cantonnent l'artiste dans une unique fonction de concepteur d'œuvres, ils ont toujours mené des activités de recherche, d'enseignement et de militance parallèlement à leur travail artistique, ainsi qu'une activité d'organisateurs d'exposition, en particulier avec le projet de réflexion sur l'art et l'environnement Veilleurs du Monde (Worldwatchers) qui se poursuit internationalement du Sud au Nord depuis plus de dix ans (Bénin, Cameroun, France, Norvège...).

« Une partie de notre travail questionne la manipulation du vivant par la technologie, en particulier par les biotechnologies. Souvent, cette réalité est difficile à transmettre sur le plan imaginaire du fait de sa complexité scientifique. Pourtant, elle véhicule aujourd'hui une incroyable force évocatrice des libertés que l'homme s'octroie sur le vivant grâce à la science. Il y a là pour nous l'ouverture d'un univers à la fois fascinant et inquiétant tant il remet en question notre conception de l'existence et nos valeurs éthiques. Il nous a toujours semblé primordial que l'art ne s'investisse pas seulement dans la forme, si fascinante soit-elle, mais qu'il ait aussi un retentissement conceptuel, fictionnel, et politique. Aujourd'hui, nous menons de front plusieurs projets qui joignent des préoccupations artistiques, scientifiques, éthiques et environnementales.

Nous allons réfléchir cette année à la façon dont le travail numérique permettrait d'augmenter la part fictionnelle d'expériences bien réelles, conduisant un questionnement accru sur l'ambiguïté entre réalité et imaginaire. Des expériences de biotechnologie qui semblent improbables au plus grand nombre, telle la transformation génétique successive d'une bactérie pour obtenir une Souris en odeur de sainteté, autrement dit une souris qui émette « naturellement » des odeurs d’encens et de violette, sont-elles plus inouïes, plus irréelles que les fantasmes humains véhiculés par les récits mythiques qui ont conduites à sa conception ? Où est la réalité ? Où est la fiction dans un monde entropique ? Peut-être est-ce à la frontière que se situe la richesse de l'expression artistique, en ce sens que l’état borderline est selon nous celui de la plus grande interrogation, de la plus grande spéculation entre notre conscience et notre émotivité. L'œuvre y devient l'objet d'une attirance troublante derrière laquelle se dissimule la complexité du monde réel, et l’on peut y concevoir l’outil numérique comme l'amplificateur de cet état de trouble et de chaos à l'origine de toute génération » AOO