Tomo - Film de Bakary Diallo
Tomo
De Bakary Diallo, film 2012
L'Humain perdu Les films de Bakary Diallo traitent de la violence, de la guerre, de la démocratie. Ils portent le souci de la vie et des hommes, des conséquences psychiques d’actes irréparables sur leurs auteurs. Tomo évoque la littéralité du mot bambara : un territoire déserté du fait de la guerre. Conflit par les armes et conflit dans les esprits. Celui qui revient et guide le spectateur se trouve réduit à un bras portant un regard affolé, dans des pas hagards de bête traquée, traversant des lieux vides, ne rencontrant que fantômes et signes d’abandon. Les vivants ont disparu. Des ectoplasmes les remplacent dans un simulacre de vie. Tomo dit la guerre en général, la ruralité malienne est traitée comme arrière-fond neutre du bouleversement qu’induit la guerre dans toutes les psychés du monde. Tous ceux qui approchent la violence sont détruits, y compris ceux qui ne sont pas physiquement morts, mais y ont laissé leur âme. Pour expression de cette violence complexe, visuelle et auditive, l’artiste s’en tient à des tranchements, des fracas, des halètements, des petits bruits de la vie, du vent, des percussions, des chants, des craquements du sol et du feu. À des fantômes de flammes et de fumée qui accomplissent les gestes du quotidien à la place des vivants, au plus près de la réalité. Ode à la non-violence, ce film fait l’économie des images sanglantes et d’une narrativité platement expressive, il s’en tient à l’après, sans tomber dans le psychologisme ou la morale. Constat et profession de foi. Tomo s’ouvre sur les motifs de la contrainte mentale, de la fuite éperdue et vaine et de l’aliénation collective. Ce qui lui donne force et trouble repose sur une construction qui met en perpétuelle collusion trois niveaux d’espace-temps : le passé, l’hallucination, le réel. Le spectateur côtoie à la fois des spectres en combustion, leur intériorité, et les mondes invisibles. Bakary Diallo restitue dans une esthétique hypnotisante le vécu universel des esprits asservis. Joëlle Busca
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