Else est une adaptation vidéographique de Fräulein Else, roman d’Arthur Schnitzler. C’est le récit à la première personne des derniers jours d’une jeune fille de bonne famille qui, en vacances dans les Alpes, est contrainte de demander de l’argent à Dorsday, un vieux jouisseur, marchand d’art, pour sauver son père, un avocat viennois criblé de dettes. Dorsday lui demande en contrepartie de pouvoir l’admirer nue. Le rôle de Dorsday est tenu par Jean-Pierre Beauviala, l’inventeur de la caméra vidéo de poing et du marquage temps dans les caméras film. C’est lui qui dotera Else de l’instrument de mesure. À la fois prothèse technologique et miroir magique, c’est cette caméra qui enregistrera et cultivera le schisme de l’héroïne. D’où la nécessité pour moi d’être à la fois l’interprète et la réalisatrice du film. Le rôle du père est tenu par le colonel Manchot, mon grand-père, figure politique bien connue de son temps, mort en 1971. Son interprétation se fera donc via des images d’archives qu’Else tentera de ranimer par des rituels absurdes, signes de sa mauvaise conscience. Des plans tournés dans les Alpes ponctueront le récit pour permettre à Else de prendre de la hauteur sur le reste du film tourné en studio, dans une chambre noire qui accueille les diverses projections mentales de la jeune fille. Deux types d’environnements qui rendent compte du va-et-vient entre Else qui prend SA mesure et Else qui prend LA mesure. Car c’est bien à l’échelle d’Else, autour de repères sexués donc, que Schnitzler élabore sa critique du libéralisme.