Face à un film nos yeux subissent le défilement des images, et fonctionnent donc essentiellement par réflexe. A contrario l'image photographique nous donne le temps de décrypter tout ce qui la compose, mais limité dans l'espace-temps d'un cliché. Ce temps figé de la photographie est en décalage avec celui que prend sa lecture, car chaque détail sur lequel le regard se porte appartient au même instant. Grâce à l'accumulation de clichés d'un même lieu à différents instants, chaque détail appartient à un temps différent. Par cette manipulation de la photographie, apparaît une cohérence entre le temps de la scène et le temps de lecture. Chaque nouveau détail focalisé implique que notre regard s'est déplacé dans l'espace et dans le temps ; Ainsi une trame narrative se construit, dépendante de notre sens de lecture de l'image. La question concernant la diversité des temps dans une même image m'est venue du travail de Bruegel sur le cycle des saisons ; Deux mois sont rassemblés dans une même toile pour évoquer plus puissamment le processus continu de la vie organique. Mes images sont un condensé d'instants extraits d'une heure de la vie quotidienne dans différents espaces de vie. Un personnage seul marche ou attend, un peu plus tard il réapparaît mais au milieu de tout ce qui s'est passé entre ces deux instants.