Une minute de révolution - Installation de Grégory Buchert
Une minute de révolution
De Grégory Buchert, installation 2012
Points cardinaux Est Sur un moniteur, demeure l’image d’un giratoire, fleuri et anodin. Le plan fixe donne à voir la vie d’un carrefour dont tout le monde se fout. C’est pourtant sur cet îlot qu’un jeune homme s’est exilé pour éveiller le romantisme le plus radical dans le climat d’une commune ordinaire. Gregory Buchert et moi avons vu le jour dans le même hôpital, situé dans le voisinage du rond-point en question. Bien qu’anecdotique, la donnée m’a fait identifier sa production comme on le ferait d’un naufragé dans le désert bas-rhinois. L’indigène développa en ce contexte une sensibilité dont il aiguisa progressivement les formulations jusqu’à aboutir aujourd’hui à une constellation de vidéos. Leurs modes de présentation précis colonisent davantage que la simple surface d’un écran. Ouest Après avoir courageusement cheminé, les épaules chargées d’une pesanteur mélancolique, notre personnage se retrouve à l’autre bout du monde. La contrée est reconnue pour les palettes fauves qu’elle hébergea épisodiquement et c’est cette même flamboyance que Gregory Buchert entraîne vers l’obscurité. La nécessité d’affirmer sa filiation éclôt déjà, donnant à voir le medium vidéographique comme progéniture de la peinture. La complicité tissée avec un peintre breton servira de trame à un enregistrement impressionniste. Sur le motif, la concurrence de la toile contre la caméra prend pour prétexte l’éternelle course du soleil entre les nuits. Deux représentations se cognent mais partagent l’éminence de la contemplation. Sud La dimension protocolaire des œuvres de Gregory Buchert culmine avec son odyssée vers la reconnaissance, celle d’un père disparu en laissant de maigres traces qui conduiront son existentielle migration vers le midi. Et l’épopée commence là où il était prévu qu’elle se termine. Dans un camping-car entouré de patients complices, il s’agira d’épuiser la littérature comme carburant. Car ce sont bien les pages qui font avancer l’équipe, qui concrétise le caprice grave et nécessaire d’un enfant voulant se mesurer à son ascendance. L’introspection franche sait rester pudique et réussit à trouver les formes pour tous nous concerner. L’enquête s’interrompt entre deux continents, sur un océan de promesses où résonne encore l’accent alsacien. Nord L’autre rive, le nouveau monde, est ce projet qui honore l’issue d’une formation au Fresnoy. Cette nouvelle déclinaison de l’endurance s’émancipe de la figuration de soi. Alors que les précédentes analyses s’attachaient avec esprit aux liens viscéraux de l’amitié ou de la famille, cette installation prend un recul inédit pour extraire une forme générique de solitude en proie au vertige des cycles ancestraux. Sous les astres et selon un plan circulaire nécessaire à toute révolution, un être et son double errent d’aurores en crépuscules. Tout les séparent. Ils répètent pourtant la même trajectoire. Finalement, chacun naît au même endroit et grandit en traversant ces sentiments élémentaires désignés par Gregory Buchert, possible boussole. Joël Riff
Oeuvres de Grégory Buchert produites par Le Fresnoy :
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