« L’action se déroule de nos jours, partiellement dans un piano-bar, durant le tournage d’un film muet en noir et blanc. L’acteur principal essaye successivement les oripeaux spécifiques à chaque personnage de la scène pour choisir son rôle (pianiste, barman, ivrogne, danseur, écrivain). Mais il ignore que le film se poursuit en couleurs dans sa vie privée qui se révèlera toute aussi fictive ! » L'histoire s’appuie sur la dichotomie entre un déroulement prédéterminé et la question existentielle initiale. Dans cette situation de plateau de tournage, c’est la prise de conscience d’un homme sur son statut. Il est formaté, cadré, tributaire des figures cinématographiques, d’une vie où on lui impose un registre sonore, un champ visuel, un spectre de couleurs restreintes... Il cherche une liberté psychologique hors des rails du script pour exister. Via un travail apparemment programmé, aux rushes planifiés, l’évolution du personnage se parcourt dans le même temps, sur une tranche de vie commune avec le spectateur qui le prend en filature malgré lui. La simultanéité et le décalage ponctuel de pratiques sonores, visuelles, typographiques, rend le processus filmique aussi présent et fonctionnel qu’un personnage secondaire habituellement. Des imbrications continues de sonorités naturelles et musicales composent et scindent rythmiquement l'action. Le film s'orchestre sur un mouvement de balancier proportionné aux intrusions respectives du son et de l’image, scénographie pour l’oreille/musique pour les yeux.