Ramy Fischler
Ramy Fischler, designer belge de 37 ans, a créé son studio de création après avoir collaboré dix ans aux côtés de Patrick Jouin, et après avoir été pensionnaire de la Villa Médicis en 2010. Diplômé de l’Ecole Nationale Supérieure de Création Industrielle, à Paris, sa pratique du design embrasse tous les champs de la production industrielle, artistique et culturelle.
L’image en mouvement se met au service du quotidien. Elle interagit avec l’environnement, passant de son monde fictionnel au monde réel
Conscient que l’acte de création doit s’adapter à son époque, à ses outils, pour engendrer des convergences et du sens commun, Ramy Fischler se consacre à des projets et à des problématiques aussi diversifiés que complémentaires à ses yeux: des objets connectés, du mobilier, des scénographies d’exposition. Il intervient dans l’univers domestique, dans l’espace public, dans le monde hospitalier, ainsi que dans le monde de la gastronomie ou de la culture, et bien souvent les deux à la fois, comme c’est le cas actuellement pour Cinéma Paradiso, un projet en cours de réalisation à São Paulo, pour MK2. Ici, le cinéma se transforme en cabaret contemporain, en lieu de vie et de rencontre, où le mobilier, la lumière et la scénographie sont conçus en totale harmonie avec la fonction plurielle du lieu. La prochaine scénographie du Mémorial de la Shoah sera elle aussi conçue par le designer avec le projet de croiser les regards et les compétences, en tentant de présenter l’histoire et de la faire partager autrement, par le biais de dispositifs et d’installations audiovisuelles conçues en collaboration avec de jeunes artistes. Avec toujours le même désir de faire cohabiter, collaborer, dialoguer les acteurs essentiels à sa pratique, issus du monde industriel, culturel, scientifique ou artisanal, Ramy Fischler fait partie de cette génération de créateurs ayant évacué la notion de disciplines, de frontières, privilégiant l’originalité de la réponse, différente selon chaque contexte.
Cette recherche de décloisonnement est aussi au cœur de la pédagogie du Fresnoy, institution dans laquelle le designer entame sa deuxième année en tant qu’artiste professeur invité. L’année 2014-2015 lui permet d’initier - en marge de l’accompagnement artistique des étudiants de deuxième année - une collaboration avec le metteur en scène Cyril Teste. De cette rencontre nait un premier dispositif scénique pour accueillir l’œuvre musicale de Jesper Nordin, compositeur suédois en résidence à l’IRCAM, interprétée par un quatuor à cordes. Ramy Fischler a aussi opéré un rapprochement entre cinéma et design, au travers d’une production de luminaires dont l’éclairage provient des films, réalisés spécialement à cet effet, avec Alain Fleischer. Pour faire varier l’intensité de la lumière, il faut agir sur la séquence filmée et sur les acteurs. Les films sont diffusés sur des écrans surmontés d’un dispositif de LED qui prolonge les faisceaux de lumière. L’image en mouvement se met au service du quotidien. Elle interagit avec l’environnement, passant de son monde fictionnel au monde réel, sans interruption, ce qui ajoute à la beauté de la lumière une dimension narrative. Le luminaire concède à son propriétaire des pouvoirs surhumains, lui permettant de manipuler un récit en temps réel, comme c’est le cas dans le monde des jeux vidéo. Ramy Fischler souhaitait réunir dans un même objet deux conceptions de la lumière diamétralement opposées, que sont les luminaires et le cinéma, alors que leurs propriétés technologiques sont, elles, presque identiques.
L’objectif de cette seconde année au Fresnoy est de réunir plus encore le spectacle vivant, le cinéma et le design, par le biais notamment des technologies, en poursuivant le dialogue initié avec Cyril Teste; de leur rencontre est née pour le designer comme le metteur en scène la conviction que le monde des objets, des nouvelles technologies et du spectacle, une fois associés, pouvait générer des modes de représentation ou d’interactions inédits entre les acteurs, les interprètes, et le public. Ils se consacreront donc à la création d’une œuvre commune qui allie le fond et la forme, le virtuel et le réel, et qui porte un regard critique sur des problématiques qui rendent la création contemporaine, associé aux nouvelles technologies, à la fois passionnante et complexe dans sa mise en œuvre. Ce travail sera l’occasion de partager avec les étudiants de deuxième année des questions essentielles au développement de leur propre pratique artistique.