Arnaud Petit

Ecole

Compositeur, Arnaud Petit s’est intéressé et confronté à l’image sous diverses formes. En choisissant de travailler avec des films muets à la fin des années 80 à l’Ircam, il développe le pouvoir de mise en scène des images au moyen de la musique et du son. Dans l’opéra La Place de la république, créé au Centre Pompidou au début des années 90, il réalise lui-même une partie cinématographique centrale de l’opéra. Il s’est intéressé aussi au déploiement sonore et musical d’expositions (notamment «Les immatériaux», avec Jean-François Lyotard). Depuis lors, la musique orchestrale ainsi qu’électronique a tenu une place importante dans sa production. Il s’intéresse aussi au lien entre musique «populaire» et musique écrite, et pour l’explorer a créé en 2013, avec Daniel Yvinec, le Chaos orchestra. Il travaille aussi actuellement à une adaptation d’un texte de Nicolas Bouvier, intitulée Halla San, pour soprano, acteur et ensemble de percussions, qui sera créée en janvier 2016 au Théâtre de la ville/Théâtre des Abbesses, par les Percussions Claviers de Lyon. Il a obtenu plusieurs distinctions en Europe et aux Etats-Unis (Lauréat Lavoisier, Villa Médicis, McDowell Fellow, International Theatre Institute…).

Le projet d’un jeune artiste du Fresnoy, selon ce que j’ai pu observer, c’est un peu comme un road-movie initiatique intérieur

L’idée reste confusément répandue qu’un art ne s’apprend pas, ou plutôt ne s’apprend pas de la même manière qu’une autre activité humaine. Pourtant il existe des écoles d’art, et des professeurs y enseignent. Observer le monde de la pédagogie artistique avec un regard détaché des contraintes sociales, académiques, institutionnelles, reste certainement une entreprise complexe, et peut-être impossible.

Au Fresnoy, des artistes accompagnent des étudiants dans leur cheminement, en essayant de comprendre la nature de leur regard, et les aident à s’accomplir. Un compositeur est plus un artiste de l’écoute que du voir. Pourtant d’étranges correspondances se font jour, et les préoccupations structurelles du musicien éclairent parfois celles du plasticien ou de l’artiste visuel plus qu’on ne pourrait l’imaginer au premier abord. Le projet d’un jeune artiste du Fresnoy, selon ce que j’ai pu observer, c’est un peu comme un road-movie initiatique intérieur. Il me fait penser à ces romans qui mettent en scène un déplacement salutaire (pensons à Nicolas Bouvier, Primo Levi, Joseph Conrad, Jerzy Kozinsky et bien d’autres), déplacement créateur qui s’inscrit aussi dans l’espace de la pensée, sans lequel rien ne peut vraiment s’accomplir.

C’est aussi une forme de déplacement, mais de l’image que l’on a de soi, qui est à l’œuvre dans le projet ID.

ID est un opéra qui explore l’idée du dédoublement. Il est conçu par Arnaud Petit et Alain Fleischer. Un personnage (une soprano dramatique) s’observe lui-même, comme en un miroir. Son image progressivement s’émancipe jusqu’à devenir une identité mouvante, chantante elle aussi, avec laquelle un rapport étrange se noue. S’agit-il d’une relation avec sa propre mémoire, ou bien de la réapparition d’un être disparu depuis longtemps, ou bien encore de la pure invention d’un esprit errant?

Un mystérieux personnage, incarné par un mime sur la scène—qui se meut aux confins de la danse et d’un art antique du mouvement—semble avoir un pouvoir profond sur le devenir et le comportement du double. Ce dernier, pure création technologique, que pourra-t-il nous aider à comprendre de notre rapport d’aujourd’hui au monde?

Le développement technologique, sans lequel ID ne pourrait exister, est élaboré grâce à une collaboration unique entre divers partenaires (Cirrmt et Théâtre Omnibus à Montréal, Diem et Ircam à Paris, Numédiart et Acapela Group à Mons, Inria et Le Fresnoy à Tourcoing, qui en est le maître d’œuvre principal). ID a bénéficié d’une aide de la DGCA.

Arnaud Petit